Les Piafs

Hier, il est venu mon jardinier,
De mon jardin tout redresser,
Refaire un beau gazon
Tout autour de la maison.
Pour que je revoie l'azur,
Nettoya aussi le mur,
D'un gros outil, ôta le lierre
Pour que paraisse la pierre.
Maintenant, c'est une merveille,
A nulle autre pareille,
S'endormant doucement
Avec le soleil couchant.
Et voici aussi, bruyants, tout petits,
aller,
Des oiseaux qui regagnent leurs nids.
Joyeuse cohorte, avide d'un abri,
Qu'elle trouve ici pour la nuit.
Reprenant son vol, désemparée
De n'avoir plus retrouvé
Au moment du sommeil
Une feuille qui lui cache le ciel.
Elle reprend la volerie,
Tourbillon de folie,
Qui anime ce monde sidéré
Des oiseaux désemparés,
Le cortège volant en désarroi,
Ne retrouve plus l'endroit
Où il dormait hier :

IL N'Y A PLUS DE LIERRE

Et la gente ailée volette de ci, de là,
Perdue, affolée, le moral au plus bas.
Que faire de bien,
Avant la nuit qui vient ?
C'est la panique générale,
En ce mystère anormal.
Ainsi finit la démocratie
Quand la masse s'écrie :
Pourquoi nous a t-on conduit là ?
Je reconnais le grand thuya !
Réplique le plus malin
Qui s'engouffre dans le sapin.
Il y passera la nuit,
A l'abri de la pluie.
Quelques autres plus sages,
Ou fatigués par l'âge,
Suivent le même chemin,
Attendant le lendemain.
Encore jeune et rebelle,
Légère et trop belle,
Une star méprise cet avis
Tournant sa queue par mépris,
S'envolant faire un tour,
Suivie de toute une cour.
Et tout un peuple qui ne sait où
Sans retenue se remet à piailler.
Vociférant sur le fil électrique,
Un leader politique,
Dit à chacun ses droits
Dans le lierre d'avoir un toit
Las de tant d'agitation
Nombreux, ont trouvé la solution
Dans des arbres voisins,
Attendrons le petit matin.
Quand le jour fut levé
Ils se sont tous retrouvés
A la cantine des poules
Mélangés à la foule,
Pillant du grain,
Jusque plus faim.
Je les revis, un peu plus loin,
Dans le grand saule du voisin.
Aussi nombreux et calmés,
Ils ont déménagé,
Changé de logement,
Mais gardé le ravitaillement.

Raymond Pouillard